« Autoportrait de l’auteur en coureur de fond » de MURAKAMI Haruki

« Autoportrait de l’auteur en coureur de fond » de MURAKAMI Haruki

Pour tous ceux qui espéraient avoir plus de détails sur la vie privée de l’auteur, sur ses positions politiques, sur ses goûts littéraires et artistiques, sur son attachement à son pays d’origine, ils seront peut-être déçus. Mais pour tous ceux qui aiment son écriture, sa manière de rendre le moindre petit événement beau, tendre et transcendé, bref, pour tous ceux qui aiment s’émerveiller devant le pouvoir de la littérature dans sa plus grande simplicité, ce livre est un véritable régal.

Certes, MURAKAMI nous parle quelque peu de sa manière de travailler, de sa discipline quotidienne d’écrivain qui ne se lasse de poser ses innombrables caractères sur la feuille blanche, de ses échecs mais surtout de ses victoires. Mais ce dont il veut absolument nous parler, c’est de cette discipline sportive et solitaire qu’est la course à pied. Que ce soit le simple jogging matinal que bon nombre d’humains pratiquent pour se tenir en forme ou du marathon (le but final de l’écrivain) qui, lui, est plus qu’une simple manière de ralentir la course du temps, mais plutôt un dépassement de soi si cher à l’auteur.

On retrouve donc MURAKAMI dans divers endroits du globe comme New York (pour son fameux marathon annuel), la Grèce (pour son historique course entre Athènes et Marathon) ou encore Hokkaïdo (Japon) pour un course de fond qui sort vraiment de l’ordinaire.

Toutes ses courses, MURAKAMI a eu la très bonne idée de nous les faire partager dans ce livre avec sa manière unique de transcender le réel et le banal. On verra donc ce coureur philosophe parcourir les rues et les campagnes du monde entier passant de l’espoir au désespoir, d’une forme physique qui l’étonne lui-même à un épuisement total, d’un amour profond de ce sport au questionnement le plus profond sur la valeur de la vie. Mais dans sa vie, ses oeuvres et ses différentes épreuves, MURAKAMI semble ne jamais être lâché par cet espoir et cet amour profond de la vie, qui se ressentent dans ses livres et qui nous font tant de bien lors de la lecture d’un de ses nouveaux livres, et même, lors de la relecture d’une de ses œuvres.

Petite note particulière pour le court récit qu’il nous fait de sa course d’Athènes vers Marathon dans lequel on retrouve toute la sensibilité et le subtil humour de l’auteur qui nous fait part de l’étonnement des Grecs de voir un Asiatique courant tranquillement vers cette destination sportivement historique qu’est la ville de Marathon. Petit récit autobiographique qui concentre en lui tout ce qui fait d’une nouvelle un véritable chef-d’œuvre.

Au delà de ce petit « essai » sur la course à pied, on a quand même l’occasion de découvrir une facette cachée de l’auteur, à savoir son refus d’accepter l’échec. Si quelque chose lui résiste, il n’en dormira plus de la nuit, et surtout s’il n’en comprend pas la raison. Le fait de ne plus sentir son corps lui obéir est une chose, mais ne pas comprendre pourquoi ses muscles ne lui obéissent plus, ça c’est au-dessus de ses forces.

On apprendra également que MURAKAMI n’a aucun sens de la compétition. S’il s’amuse de se voir dépasser une bonne centaine de participants, ce n’est pas parce qu’il espère arriver avant eux à la ligne d’arrivée, c’est juste parce qu’il vient de subir une baisse de régime, et que son corps est à nouveau en état de le conduire là où il veut et à la vitesse qu’il désire.
Et pour un écrivain, c’est une des plus grandes qualités qu’il faut posséder : se concentrer sur son récit, le rendre le plus sincère possible, le plus lumineux ; et ce qu’il en adviendra plus tard doit rester au second plan.
Autoportrait de l’auteur en coureur de fond

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