Le titre « La harpe de Birmanie » comme le sujet de ce roman ne suscitaient pourtant guère mon désir de lecteur.
Nous sommes en 1945, c’est la fin de la seconde guerre mondiale et une troupe de soldats japonais faits prisonniers en Birmanie apprennent que le Japon a capitulé suite au largage de deux bombes atomiques. Seulement, une compagnie nippone résiste encore quelque part dans le pays birman et si personne ne les informe qu’il n’est plus nécessaire de se battre, elle va mourir en vain. Un soldat se décide seul à accomplir cette mission : Mizushima.
L’écriture directe et sans manière est d’une humble allure. La préface nous informe que c’est un ancien soldat de la guerre en Birmanie qui a fait le récit de cette histoire à l’auteur, et c’est sans doute de ce dispositif de narration que provient la simplicité, la timidité presque, du style. Un militaire nous parle et raconte la fascination et l’amour que lui et ses camarades envoyés sur le front birman ont ressentis pour Mizushima.
Ce personnage principal n’est donc jamais vu que de l’extérieur. Les premières pages nous le présentent comme jeune, malin, brave, sachant jouer de la musique et capable d’être confondu avec un autochtone quand il s’habille en tenue birmane avant de partir en éclaireur. C’est son talent et ce sont ses exploits qui nous sont contés par un témoin direct. Même quand il part remplir sa mission et qu’il disparaît de l’entourage immédiat du narrateur comme de la quasi-totalité du roman, car personne ne sait ce qui lui est arrivé, à la manière d’un personnage hors-champ, il reste la figure centrale du récit. Tous les soldats de sa troupe pensent et parlent de lui, ce qui lui confère un charisme stupéfiant. Cela rejaillit sur la lecture car il est impossible de ne pas être séduit par cet homme et ému par la fascination saine qu’il suscite chez les soldats en captivité.
Le roman évoque la religion et la politique et ce qu’elles impliquent lorsque l’une et l’autre sont essentielles dans une société. Le message qui en découle est limpide : maintenant que le monde a les moyens de se détruire aisément (l’atome à usage militaire), il faut que nous trouvions le chemin philosophique de vivre dans la paix. L’auteur, à travers l’exemple de la bonté religieuse qu’adopte Mizushima (il s’est fait moine après sa mission), exprime l’idée que le Japon devrait s’inspirer de la morale paisible des pays d’Asie du Sud-est et se détourner définitivement de l’expansionnisme guerrier.
Il ne faut pas toujours suivre sa première impression de lecteur. Il se trouve que ce roman fait du bien.
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